Un motif juridique au parfum politique
La candidature de Maurice Kamto à la présidentielle de 2025 a été rejetée par ELECAM pour « pluralité d’investiture ». Officiellement, deux candidatures celle de Kamto et celle de Dieudonné Yebga seraient toutes deux adossées au MANIDEM.
Sur le papier, cela justifierait un rejet. Mais en réalité, les deux investitures proviennent d’instances distinctes :
- Kamto est investi par la direction historique et reconnue du MANIDEM, conduite par Anicet Ekane.
- Yebga bénéficie d’un « soutien » issu d’un cercle concurrent, aux contours opaques et au parcours soudainement légitimé par des modifications administratives.
Question : Comment ELECAM peut-il retenir la pluralité d’investiture comme motif, alors que l’origine et la validité des deux instances sont contestées ?
Réponse implicite : la loi est interprétée selon les besoins politiques du moment.
Le respect de la loi… à géométrie variable
Le Code électoral (articles 117 à 126) précise les conditions d’éligibilité, d’investiture et de dépôt des candidatures.
Or, dans ce dossier, plusieurs anomalies interpellent :
- Aucune vérification publique sérieuse n’a été menée sur la légitimité des instances signataires.
- L’argument de pluralité n’est pas appliqué de façon uniforme : dans d’autres cas de partis avec factions rivales, ELECAM a accepté une investiture et rejeté la seconde après examen interne.
- Le rejet simultané des deux candidatures – plutôt que la résolution du conflit – sert objectivement à écarter Kamto.
Le problème n’est pas seulement juridique. Il est politique et institutionnel.
Un climat sociopolitique verrouillé
Depuis des mois, le Cameroun vit une séquence politique tendue :
- Surveillance et intimidation des opposants ;
- Restrictions systématiques des libertés publiques (manifestations interdites, arrestations arbitraires) ;
- Exploitation des divisions internes dans les partis d’opposition pour fragiliser les candidatures.
Le cas Yebga illustre cette stratégie : un candidat peu connu, soudain propulsé dans une querelle d’investiture, devient l’élément déclencheur pour invalider une candidature jugée dangereuse pour le statu quo.
Un État de droit sous contrôle politique
Les autorités camerounaises proclament leur attachement à la Constitution et au Code électoral. Mais dans les faits :
- Les procédures juridiques sont instrumentalisées ;
- Les institutions électorales ne sont pas perçues comme indépendantes ;
- La notion de justice électorale est remplacée par une logique de contrôle politique.
En rejetant Kamto sur la base d’une pluralité d’investiture douteuse, ELECAM envoie un message clair : l’élection sera filtrée en amont.
Voix Plurielles appelle Ă la vigilance
- La diaspora et la société civile doivent documenter ces manœuvres, les dénoncer et les diffuser au niveau international.
- Les instances régionales et internationales (UA, ONU, partenaires bilatéraux) doivent exiger la transparence des procédures électorales.
- Les citoyens doivent comprendre que l’alternance ne viendra pas d’une élection verrouillée si la vigilance collective s’affaiblit.
“Quand la loi sert à exclure, ce n’est plus la loi : c’est un outil de domination.”
La démocratie n’est pas un slogan, c’est un engagement.