Par la rédaction de Voix-Plurielles
Élection présidentielle – 11 octobre 2025

À 24 heures du vote présidentiel, le gouvernement camerounais impose une série de restrictions sévères sous couvert de « mesures préventives ». Mais à y regarder de plus près, ce communiqué signé du MINAT s’apparente moins à une précaution sécuritaire qu’à une stratégie d’intimidation et de contrôle social généralisé.

Un cadre électoral verrouillé sous prétexte de sécurité

Ce communiqué introduit une batterie de mesures liberticides dans une période censée être celle de l’expression populaire et de la participation civique :

MesureEffet réel
Couvre-feu à 18hEmpêche les citoyens d’assister au dépouillement ou de surveiller le vote.
Interdiction de rassemblements (lieux de culte, bars, marchés)Réduction massive de l’espace public, étouffement du débat et isolement social.
Coupure potentielle d’internet et des réseaux mobilesRupture de la chaîne d’information citoyenne et des initiatives de transparence (transmission des PV, signalements).
Interdiction de débats politiques « conflictuels »Glissement dangereux vers la criminalisation de toute opposition ou critique.
Obligation de carte d’identité pour circulerDans un pays où des millions de Camerounais ne l’ont pas encore reçue, cela revient à priver massivement les citoyens de leur liberté de mouvement, voire de leur droit de vote.

Une démocratie sous surveillance, pas protégée

Le moment électoral devrait être celui de l’ouverture, de la transparence, et de la libre circulation de l’information. Au lieu de cela, ce communiqué installe:

  • La peur de s’exprimer : Les citoyens sont implicitement invités à se taire ou à se méfier les uns des autres. Même un simple « chuchotement » devient suspect.
  • La peur de se déplacer : La restriction des déplacements interurbains peut empêcher de nombreux électeurs de voter ou de participer à la surveillance citoyenne du processus.
  • La coupure de la communication : Le blackout numérique empêche le relais des résultats affichés dans les bureaux de vote et favorise la manipulation centralisée des chiffres.

Au final, c’est la souveraineté populaire qui est mise sous verrou.

 Des contradictions criantes avec la réalité du terrain

Ce communiqué suppose que chaque citoyen peut prouver son identité à tout moment, avec une carte nationale valide. Or:

  • Des milliers de Camerounais n’ont pas encore reçu leur carte d’électeur.
  • L’obtention de la carte d’identité nationale prend des mois, voire des années, dans certaines localités.
  • Les centres d’enrôlement sont souvent saturés, mal équipés ou peu accessibles.

Exiger un document d’identité dans ces conditions revient à exclure arbitrairement une partie de la population du processus démocratique.

 Un encadrement qui étouffe plus qu’il ne protège

Sous couvert de « prévention », le gouvernement :

  • Confisque l’espace public, transformant chaque regroupement en menace potentielle.
  • Fige la société civile, empêchant la mobilisation et la surveillance citoyenne.
  • Crée un climat d’insécurité psychologique, propice à la résignation, à l’auto-censure, et à l’acceptation passive de toute fraude.

Ironie ultime : l’interdiction de toute réjouissance avant les résultats officiels, comme si la seule émotion autorisée dans cette élection était la peur.

 Conséquences prévisibles sur le processus électoral

  1. Dissuasion massive de la participation : Les électeurs, surtout les jeunes, risquent de rester chez eux par peur d’arrestation ou de violences.
  2. Obstruction à la transparence : L’interdiction de circuler et de communiquer prive les citoyens de leur capacité à surveiller, documenter et contester les résultats.
  3. Perte de légitimité du scrutin : En réduisant la participation et en contrôlant l’information, le gouvernement affaiblit la crédibilité de l’élection.

 Conclusion : Gouverner par la peur, c’est déjà perdre la confiance du peuple

Ce communiqué, au lieu d’assurer le bon déroulement de l’élection, sème la peur, restreint les libertés et prépare un terrain fertile à la contestation post-électorale. Il confirme une chose : le régime redoute plus la voix du peuple que la violence elle-même. La vraie sécurité électorale ne se construit pas avec des couvre-feux, des menaces et des coupures d’internet. Elle se construit avec:

  • Des institutions indépendantes
  • Des citoyens libres d’agir et de parler
  • Des élections transparentes et ouvertes

 Ce que le pouvoir appelle « mesures préventives, le peuple pourrait bien le lire comme une tentative de confiscation de sa souveraineté.

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Related Posts