Par Voix Plurielles
Le 29 juillet 2025, un scandale inédit a secoué la région du Centre. Le Commissaire divisionnaire Josué Ossomo, Délégué régional par intérim de la Sûreté nationale, a été relevé de ses fonctions après la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos compromettantes le montrant en relations sexuelles avec plusieurs policières en uniforme, à l’intérieur de son bureau de Yaoundé.
La Direction générale de la Sûreté nationale a immédiatement nommé le Commissaire divisionnaire Armand Abena pour assurer l’intérim, le temps qu’une enquête disciplinaire interne et une information judiciaire parallèle fassent la lumière sur l’affaire.
Les points clés de l’enquête
Les investigations devront se pencher sur plusieurs aspects :
- Usage des locaux de service : Les règlements interdisent l’utilisation des bureaux pour des activités non professionnelles. Les vidéos auraient été tournées en dehors des heures de travail, mais dans la suite officielle du délégué.
- Rapport hiérarchique et consentement : La question centrale reste de savoir si les policières ont participé volontairement ou sous contrainte d’un supérieur hiérarchique.
- Enregistrement et diffusion illégale : La législation camerounaise sur la cybercriminalité sanctionne la captation ou la diffusion d’images explicites sans consentement. L’identification de la ou des personnes à l’origine de la fuite fait partie de l’enquête pénale.
En cas de culpabilité avérée, les sanctions pourraient inclure la révocation, la perte de grade et des peines de prison allant jusqu’à cinq ans.
Un écho au “Baltazar Gate” de Guinée Équatoriale
Cette affaire rappelle le scandale de 2024 impliquant Baltazar Ebang Engonga en Guinée Équatoriale. Alors chef de l’Agence nationale d’investigation financière, il avait été suspendu après la découverte de centaines de vidéos sexuelles tournées avec de jeunes fonctionnaires dans des bureaux gouvernementaux.
Les similitudes sont frappantes :
- Des rapports sexuels entre hauts responsables et subordonnés sur leur lieu de travail.
- Une diffusion virale des vidéos sur les réseaux sociaux avant toute réaction officielle.
- Une pression publique qui a entraîné des mesures disciplinaires rapides et des réformes structurelles (caméras de surveillance, limitation d’accès aux bureaux, procédures renforcées).
Au-delà du scandale : un symptôme du système
Ces affaires soulignent une question plus profonde : l’état moral des institutions dans un système de gouvernance où la verticalité du pouvoir et l’impunité nourrissent la dépravation.
Dans un pays oĂą :
- Les promotions sont souvent plus liées à la loyauté politique qu’à la compétence,
- Les organes de contrôle sont instrumentalisés,
- La corruption gangrène l’administration,
… la dégradation des mœurs n’est pas qu’un problème individuel. C’est un produit du système. Les abus de pouvoir, qu’ils soient financiers, politiques ou sexuels, prospèrent dans un contexte où l’exemple vient d’en haut et où l’impunité est la norme.
Une confiance déjà fragilisée
Le Centre, qui abrite Yaoundé et les institutions de l’État, souffre déjà d’une faible confiance de la population envers la police et la justice. Ce scandale aggrave cette fracture.
La Charte d’éthique policière, adoptée en avril dernier, sera mise à l’épreuve : sa crédibilité dépendra de la capacité des autorités à mener une procédure transparente et impartiale, qu’elle aboutisse à une exonération ou à des sanctions exemplaires.
Et après ?
Des réformes inspirées des mesures équato-guinéennes pourraient être envisagées :
- Installation de dispositifs de surveillance internes (CCTV) dans les bureaux sensibles.
- Mécanismes de signalement sécurisés (whistleblowing) pour protéger ceux qui dénoncent les abus.
- Formation éthique et discipline renforcée pour briser la culture de l’impunité.
Ce scandale n’est pas un accident. Il est un miroir tendu à une gouvernance qui confond souvent service public et privilèges personnels. Tant que la culture de redevabilité restera absente, les affaires de ce genre ne seront pas des exceptions… mais des habitudes exposées au grand jour.